17/02/2023

Tangente#8 : Bandes originales.

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Bandes originales.

Cela fait déjà quelques années que les séries ont rejoint voir même supplanté le cinéma en termes de d’inventivité de création, d’écriture, d’impact émotionnel. Elles remportent une adhésion populaire exponentielle.

Vues comme des succédanés télévisuels il y a encore 15 ans, elles se sont multipliées et ont fini par attirer les grands noms des réalisateurs, les acteurs stars du box-office ou en recherche de crédibilité nouvelle. Certaines suscitent des attentes frénétiques au rythme de teasers sensationnalistes des mois à l’avance tout comme pour le cinéma.

Certes depuis la naissance de la télévision des acteurs s’y sont révélés (Clint Eastwood, Steve Mc Queen, des réalisateurs Spielberg, Hitchcock. Mais la série était surtout envisagée comme un tremplin vers le grand monde mythique du Hollywood d’alors.

David Lynch avec Twin Peaks est sans doute, au moins symboliquement, l’œuvre télévisuelle qui fut à l’origine d’un changement de paradigme.

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Trente ans après on s’emballe chaque semaine pour des séries à un rythme frénétique en binge watching (quelquefois même en mode accéléré), et comme cela l’est devenu pour la musique et le streaming, le robinet dilue fatalement sans doute sa faculté à lui donner une importance vitale.

Dans ce flot désormais ininterrompu d’images et de sons comme un gigantesque clip vidéo sous l’influence de TikTok ou d’Instagram, les recyclages des tubes de Stranger Things ou du récent Wednesday sont plus commentés que les séries elles-mêmes. Tout cela suinte de plus en plus un marketing qui évince la direction artistique.

Sur Netflix cependant le tout récent film de Noah Baumbach, White Noise tiré d’un roman de Don DeLillo, se termine par une longue séquence chorégraphiée absolument bluffante. De celles qui marquent durablement l’imaginaire de ses téléspectateurs. Elle rappelle un peu les grandes heures des comédies musicales récemment remises à l’ordre du jour par Steven Spielberg avec le remake de West Side Story et Damien Chazelle et son La La Land comme si l’auteur lançait un appel au retour dans les salles.

Ce même Chazelle dont le Babylon de ce début 2023 nous ramène à la genèse de toute cette histoire du son et de la musique au cinéma au moment charnière terrible pour une grande partie des acteurs du passage du muet au parlant.

Ce fut une rupture cataclysmique. Des stars incontournables du muet tombèrent presque du jour au lendemain dans l’oubli, ne sachant pas adapter leurs jeux ; et parfois uniquement en raison du choc des spectateurs entendant la voix insupportable de l’idole subitement dévoilée dans la salle de cinéma.

Bien avant l’arrivée du parlant la musique a joué un rôle indispensable. Il y eu des évolutions passant d’un simple accessoire pour couvrir le son des projecteurs et de la rue, puis pour rassurer les spectateurs dans le noir et enfin pour renforcer l’émotion du spectateur. La présence d’un pianiste souvent, puis du gramophone puis des bandes sons demandées par les réalisateurs. Ceux-ci demandaient couramment à être accompagnés de musiciens sur les plateaux pour imprégner les acteurs de l’atmosphère qu’ils désiraient (on le voit dans Babylon d’ailleurs).

L’arrivée du parlant bouleverse en profondeur l’approche du cinéma. Très vite les producteurs de la Fox ou de la RKO comprennent l’importance des bandes sons et de leur contribution au succès d’un film.

C’est sous l’impulsion d’un autrichien ayant côtoyé Richard Straus et Gustav Malher émigré aux Etat-Unis que les comédies musicales, les westerns et les films noirs vont connaitre leur première apogée dans les années 30 et 40. Il dirige la musique d’Autant En Emporte le Vent, en passant par Casablanca et La Prisonnière du Désert de John Ford. Max Steiner a fixé et imposé les règles de la musique à Hollywood pour des décennies. Il met en place par exemple la technique du Mickey-mousing et qui consiste à ce que la musique suive scrupuleusement ce qui se passe sur l’écran.

Sa composition pour King Kong en fait le premier film dont la critique explique sa réussite en partie pour sa bande originale.

En France, Maurice Jaubert propose une vision à l’opposée, plus expérimentale, impressionniste et moins illustrative, il compose pour L’Atalante de Jean Vigo, René Clair et Marcel Carné.

Miklos Rosza, Oscar de la meilleure musique originale pour La Maison du Docteur Edwards de Alfred Hitchcock en 1946 sera aussi l’un des grandes figures d’Hollywood avant l’avènement des couples parfois plus qu’indissociables qui donneront sur le tard leurs lettres de noblesses à la composition de musique de film.

Alfred Hitchkock et Bernard Herman, Blake Edwards & Henry Mancini, William Friedklin et Lalo Schiffrin, Jacques Demy & Michel Legrand, Georges Delerue et Godard/Truffaud, David Lynch et Angelo Badalamenti et sans doute les plus emblématiques de tous Sergio Leone et Ennio Morricone. Ces compositeurs ne deviendront vraiment des icones de la pop culture qu’au 21ème siècle.

Vont commencer à se succéder des bandes sons reflétant l’air du temps, le jazz dans les années 50 puis la pop easy-listening. C’est à ce moment-là que le rock pointe timidement son nez. Une culture propre à la jeunesse se développe. Et c’est seulement l’avènement du Nouvel Hollywood qui fait rentrer définitivement le rock dans les mœurs du cinéma.

Une grande épopée commence dont nous connaissons à peu près tous les grandes lignes, les grandes auteurs, les classiques.

Attachons-nous plutôt à évoquer des instants plus anecdotiques, certainement, au regard de la grande histoire, au travers d’une histoire parallèle comme il pourrait y en avoir des dizaines.
Mais de celles qui font palpiter nos cœurs de modestes cinéphiles et de petits mélomanes avertis ou non, au son du rock à papa ou des dernières pépites trap ou électro.


Au commencement.

En juillet 1987, lors d’une soirée de l’émission culte La Dernière Séance (de Gérard Jourd’hui, Patrick Brion et présentée par Eddy Mitchell) consacrée à Glenn Ford, star oubliée de l’après-guerre, fut proposé comme un évènement la diffusion du film Graines de Violence de Richard Brooks… Il put apparaitre comme quelque peu désuet pour le jeune spectateur de l’époque fan de Cure par exemple. Pourtant il est considéré comme celui de la première rencontre officielle du rock et du cinéma, celui qui mis le feu aux poudres …

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Nous en sommes aux balbutiements du rock, Elvis Presley n’est pas encore le roi du monde et les studios hollywoodiens ne prennent pas au sérieux cette musique pour ados boutonneux. C’est le fils de l’acteur principal, Peter Ford, 10 ans, qui pousse son père à faire écouter à Richard Brooks cette face b d’un 45 tour produit à la chaine pour satisfaire la demande frénétique de nouveautés.
Rock Around the Clock de Bill Halley and the Comets ouvre donc le film. On découvre alors dans les salles de ciné l’hystérie qui s’empare des adolescents. Car pour la plupart c’est la première fois qu’ils ressentent les vibrations, la puissance de cette musique, eux qui jusque-là n’avaient que les transistors et tourne-disques pour horizons sonores…

L’Amérique découvre l’appétence folle des teenagers et l’industrie l’existence d’un filon inépuisable dans lequel s’engouffrer… qui changera complètement notre rapport à la consommation et à la culture.

Le film The girl can’t help it (La blonde et moi en français avec Jayne Mansfield), au sommet du box-office en 1956 est d’ailleurs ambivalent. Il regorge de tubes (Little Richard, Gene Vincent) et raconte avec justesse l’envers du décor mais se moque en réalité avec une certaine condescendance du rock ‘n roll…

Dans l’imagerie populaire, James Dean était l’incarnation du gentil rebel, mais, encore aujourd’hui, Marlon Brando et son cuir dans L’équipée sauvage font office de héros Rock ‘n Roll. Pourtant point de rock ‘n roll dans le film, mais à la place une forme d’easy listening jazzy. Trop tôt sans doute.

Et c’est donc bien Elvis qui prend d’assaut Hollywood, incité par son manager, le Colonel Parker, obnubilé par le pactole qui se profile à l’horizon. Avant d’enfiler les perles dans des navets sur les plages d’Hawaii et après quelques rôles où son jeu ne convainc guère, jusqu’à sa présence dans un film de commande nommé Jailhouse Rock. Elvis apparait sous un jour plus ambiguë, montre les affres de la célébrité, des à-côtés peu reluisants du personnage et du circuit et surtout un immense moment d’anthologie avec ce titre Jailhouse Rock et sa chorégraphie qui l’accompagne, que tout le monde a vu 20 fois…


Idoles sur grand écran

Conçus à l’origine pour promouvoir les idoles naissantes désirant elles aussi toucher à ce grand écran qui les fascine et qui s’y sentent autorisées par leur statut, ces films commerciaux dépassent parfois leur cadre étriqué et deviennent des marqueurs des aspirations d’une jeunesse en rupture avec une société empesée.

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En 2021 un formidable documentaire (The Beatles : Get Back) de l’australien Peter Jackson (Les Hobbits) boucle la boucle avec un incroyable et émouvant documentaire pour la plateforme de streaming Disney+ : 13 heures d’une plongée dans la genèse de Let it be.
En 1964 Richard Lester (qui réalisera Superman 2 et 3 dans les années 80), un Américain qui sera considéré un temps comme le cinquième Beatles, va contribuer à ce que ces mêmes Beatles symbolisent définitivement la jeunesse britannique inventive et éprise de liberté…
Le film dont la première à Piccadilly attire 12000 fans et la Princesse Margaret accompagne la sortie d’un album. A Hard Day’s night marque alors une nette évolution artistique pour le groupe. Sur l’écran c’est une fiction dans laquelle évoluent quatre Beatles au naturel, annonçant avec humour et subtilité la suite décomplexée du groupe...
« It’s been a hard day’s night » est en fait une phrase lancée par Ringo Star un soir de grosse fatigue sur le tournage. Lennon en fait en chanson le soir même.

À la fin de la décennie suivante, Rude Boy comme indiqué sur l’affiche est consacré à The Clash et aux années punk. C’est à la fois un documentaire puisqu’il capture lors de tournées la vie des Clash, et une fiction puisque vue par les yeux de Ray Gange (Rude Boy) personnage inventé, archétype du punk nihiliste de l’époque et fan enrôlé comme roadie. On y voit le quotidien de deux stars naissantes en contradiction parfois avec les postulats du punk...

Le film dépasse cependant largement sa fonction première pour devenir en filigrane un formidable témoignage de la situation économique dramatique du Royaume-Uni, et des violences sociales et politiques qui traversent l’époque au son des titres de Joe Strummer et Mick Jones… Un peu comme si Ken Loach avait filmé le punk.

En 1984, et en quête de reconnaissance international à l’ombre de Mickael Jackson qui règne sans partage sur la pop, Roger Prince Nelson décide lui aussi de s’attaquer au cinéma. Il sait qu’il possède des titres puissants et que l’image est un enjeu impératif et décisif. Prince prépare un album qui fera office de B.O à un film semi-autobiographique romancée, avec une intrigue banale pour prétexte. Le film remporte un vif succès et alors que MTV prend le pouvoir, les vidéos extraites du film y tourneront en boucle. La poignante chanson Purple Rain trustera les charts mondiaux.


pop music.

Un groupe comme Goblin groupe italien progressif du milieu des années 70 doit l’essentiel de sa renommée encore aujourd’hui à la B.O. géniale, irrévérencieuse et abrasive de Suspiria en 1977, et aussi au succès populaire de Giallo de Dario Argento. Le retour de flamme de ce dernier lors des années 2000 a aussi fait resurgir dans l’actualité le groupe qui recommencera même à se produire en concert.

Mais le véritable premier album composé directement et en étroite collaboration pour un film fut sans doute l’œuvre de Pink Floyd.

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Le groupe bénéficie déjà d’un succès d’estime naissant lorsque le groupe accepte la proposition du réalisateur Barbet Schroeder pour son tout premier long métrage, More. Lui-même sera présent avec le groupe en studio. C’est paradoxalement presque contre le gré de ses membres que le disque, produit en quinze jours, fut un succès commercial.
Artistes exigeants et aux egos bien développés ils travaillaient en parallèle d’arrache-pied depuis des mois sur un autre album et en furent un peu vexés.
Cela n’arrangera pas leurs relations avec le cinéma. Suivirent les échecs avec Jodorowski pour Dune, Antonioni pour Zabriskie Point, puis le film fascinant et boursouflé The Wall piloté par le duo Roger Waters / Alan Parker. Quadrophonia transposition d’un opéra rock des Who sorti à la même période fut lui en revanche franchement convaincant.

Pléthores de B.O plus ou moins emballantes ont depuis vu leur compostions mises entre les mains des artistes pop à la mode… Plus tard à la fin du siècle, le hit Playground Lovers de Air pour Virgin Suicide de Sofia Coppola par exemple séduira au-delà du public du film.

Sur un registre plus exigeant et expérimental Jonny Greenwood, guitariste et claviériste hors pair d’un Radiohead, alors au sommet de sa gloire, se découvre un talent de compositeur de musique de film et signe un coup de maitre pour le There Will Be Blood du très perfectionniste Paul Thomas Anderson. Son atmosphère oppressante doit beaucoup à une musique dissonante et répétitive qui n’est pas sans rappeler Dead Man de Neil Young. Inspiré par les minimalistes et les expérimentaux du XXème siècle, Greenwood enchaine les B.O. et les récompenses depuis en s’affranchissant totalement du format pop.

Film drôle, hédoniste et exalté avec cet esprit belge inimitable, Belgica oscille entre drame et comédie humaine. L’auteur de La Merditude des Choses à la bonne idée de confier la bande originale aux frères David et Stephen Dewaele, qui œuvrent habituellement sous les noms de Soulwax ou 2 Many dj’s, orfèvres incontestées en matière de production de mixes et de connaissance des clubs. Ces enchainements de titres originaux épatants sont indispensables au film…

Dans toute la filmographie de Jim Jarmush les musiciens venus du jazz, du rock sont omniprésents au détour d’une scène, comme acteur avec John Lurie dans Stranger Than Paradise, ou Tom Waits en conversation dans un bar, ou encore en compositeur comme Neil Young pour Dead Man

Mais le choc esthétique fut grand en 1999 quand sorti Ghost Dog. Non seulement Forest Whitaker est éblouissant mais la B.O Signée de RZA du Wu Tang Clan, éclabousse de sa classe les années 90. « C’est le Jimi Hendrix de sa génération, le Thelonious Monk du hip-hop. » déclara Jarmush..

Dans le sens inverse des compositeurs du XXIème siècle que sont Max Richter, Jóhann Jóhannsson, Nils Frahm se sont révélés au grand public grâce à leur travail sur les séries et les films.


Sur le vif.

Des centaines de documentaires, des "rockumentaires" sont produits depuis 40 ans, encore plus depuis l’avènement des chaines câblées.
Quelques réussites surnagent, comme le Get Back de Peter Jackson ou des évocations sur le vif comme Cocksucker Blues pour les Rolling Stones, d’ailleurs longtemps censuré. Mais généralement on s’ennuie ferme.

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A New-York et Londres sur une courte période de 77 à 82 ont cependant vu le jour quelques magnifiques œuvres. Il y eu par exemple le Jubilee de Derek Jarman pour ses parties documentaires saisissantes, mais peu de films témoignent de manière aussi vibrante de vérité que The Blank Génération ou The Decline Of Western Civilization sur l’effervescence de brèves bulles artistiques, hors du temps.

Le CBGB, Patti Smiths, les Talking Heads, les Ramones, les NY Dolls, Tom Verlaine, Richard Hell, Blondie, les quartiers sordides, les drogues, l’urgence, les chocs musicaux, les fulgurances... « I belong to The Blank Generation » comme le chantait Richard Hell : tout est là dans le précieux film D’Amos Poe.
Dans The Decline of Western Civilization, Penelope Spheeris décrit de la même façon la scène punk violent et chaotique de Los Angeles : Black Flag, Germs, X…

Downtown 81 ne sortira au grand jour qu’en l’an 2000 mais c’est pour la même ville que Edo Bertoglio filme parallèlement la genèse du hip-hop, autour du peintre Jean Michel Basquiat figure à la fois centrale et marginale des milieux artistiques new-yorkais. Il n’est alors pas si rare que les rockers du CBGB côtoient les rappeurs du Bronx ou de Harlem.

Wild Style considéré comme le premier film hip-hop est remarquable de précision sur les prémices de la cette scène. Un vague enrobage fictionnel met en lumière les Fab Five Freddy, Lee Quinones, Lady Pink, The Rock Steady Crew, The Cold Crush Brothers, la Zulu Nation, Grandmaster Flash, les Block parties, le graff. Ce Wild Style fut fondamental pour la diffusion de la culture hip-hop…


Par procuration.

Ces trois films en prenant les points de vue de l’animateur radio passionné, du disquaire érudit et du journalistes en herbe, caractérisent la fascination qu’exerce le monde du rock sur leurs auteurs, leur passion pour une musique qu’il ne peuvent qu’admirer ou toucher du bout des doigts.

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High Fidelity est tiré du roman de Nick Hornby (dans Fever Pitch il déroule sa ferveur pour son club de foot Arsenal). C’est une rom com banale mais qui raconte de façon hilarante et attachante la vie d’un disquaire dévoré par sa passion. Elle décrit scrupuleusement la sociologie du disquaire et son penchant un peu vain de la collectionnite et de l’érudition, qui le condamne finalement à la solitude…
Le personnage interprété par un Jack Black plus vrai que nature que beaucoup jureraient avoir rencontré un jour chez son disquaire vaut le visionnage du film à lui seul.

Qui n’a jamais rêvé d’être le John Peel de sa génération ? Dans Pump up the Volume on se prend d’affection pour le héros introverti que l’on aurait peut-être voulu être au lycée en se déchainant derrière le micro de sa radio pirate, luttant contre la censure des contrées conservatrices armé de toutes ces musiques alternatives (cette scène au son du Wave of Mutilation (uk surf) des Pixies…).

Au-delà de l’éternelle révolte adolescente, ce Pump Up the Volume rend hommage à ces fameuses collèges-radio qui ont propulsé les destins de tant de groupes : REM, Beastie Boys, le grunge, la power pop des Pixies, Husker ou Nada Surf... Il remet aussi au gout du jour pour toute une génération, Leonard Cohen, figure du commandeur du poète folk impassible.

Plus tard le film Good Morning England rendra hommage aux radios pirates comme Caroline sur un ton plaisant mais anecdotique.

Almost Famous provoque des sentiments mitigés : film délicieux au gout doux-amer pour certains aspects, il loupe malheureusement un tantinet le coche en ne faisant qu’effleurer les questions que posent les comportements débridés et outranciers d’une aristocratie rock, qui paraissent, vue des années 2020, incompréhensibles et repréhensibles pour ce film semi-autobiographique.

Cameron Crowe démarra à 15 ans comme journaliste à Rolling Stone. Il a donc côtoyé tout ce petit monde et connait bien la scène rock des années 70. Il se remémore ces instants en inventant un groupe, Stillwaters, censé condenser les vies de plusieurs des idoles de l’époque. En fait, le mérite du film est sans doute de faire apparaitre sous les traits du génial Philip Seymour Hoffman le critique Lester Bang considéré comme l’alpha et l’oméga du genre. Ce qui mis en émois toute la frange de fans nourris a la cuture de la critique rock…

Citons en complément le petit film sans prétention mais irrésistible : Rock Academy où Jack Black fait feu de tout bois en tant que professeur de rock dans une école privée pour transmettre et donner les codes de tout bon groupe de rock pour casser les codes…


Ennio.

Tout a été dit mille fois sur Ennio Morricone, statue du commandeur de la musique de film, mais il fut aussi un certain temps méprisé par ses pairs.

Depuis la fin du 20ème siècle. il est donc littéralement adulé et est devenu une pierre angulaire de la pop culture, remplissant lui-même les zéniths lors des tournées triomphales à guichets fermés à travers le monde entier. Il a évidemment influencé bon nombre d’artistes dans le monde de la pop musique. Nous n’en ferons pas l’exégèse mais citons deux anecdotes croustillantes à propos de ses musiques.

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Si on en a le souvenir ou si on a la curiosité d’aller jeter une oreille sur le générique de La Folie des grandeurs (avec Louis De Funès sur une musique de Michel Polnareff) puis d’aller se ensuite se passer le thème intitulé La Horde Sauvage pour le film Mon Nom Est Personne on y trouvera quelques similitudes.
Le Maestro a déclaré s’être inspiré de La Chevauchée des Walkyries de Wagner mais peut-être a-t-il aussi été guidé, largement, sans trop le clamer, par cette composition de Polnareff, pour la légèreté de la mélodie par exemple… Le même Polnareff rendait avec ce titre évidemment hommage à l’une de ses idoles. Boucle bouclée.

Le thème A chapel shootout de la bande originale de Et pour quelques dollars de plus est en partie à l’origine du tube Blue Monday de New Order. Sa ligne de basse est ainsi adaptée, en accéléré, par Peter Hook le bassiste du groupe. Elle est devenue celle de l’un des morceaux emblématiques la musique électronique et le maxi 45 tours le plus vendu de l’histoire...

D’ailleurs ce même groupe demanda à Ennio Morricone de produire un album entier mais il refusa, ne voulant pas s’abaisser à produire des groupes de pop à la mode. New Order publia ensuite un titre de 17 minutes Elegia directement inspiré par ce même film.

Le groupe confia un peu plus tard la réalisation de la remarquable vidéo de l’un de ses singles The Perfect Kiss au réalisateur Jonathan Demn (Le Silence des Agneaux) en faisant appel à Henri Alekan, alors âgé de plus de 75 ans, chef de la photographie de, entre autres, La Belle et la Bête de Jean Cocteau en 1946. Alekan finissait dans le même temps son travail sur Les Ailes du Désir de Wenders en éclairant Nick Cave et ses Bad Seeds…

Le même Jonathan Demne n’en était pas à son coup d’essai : auteur d’un concert filmé des Talking Heads (Stop Making Sense) dont la vidéo Once in a Lifetime d’une intensité rarement égalée et diffusée lors du jour inaugural de MTV est conservée au Moma. Jonathan Demne offre aussi au groupe indé culte The Feelies d’apparaitre dans Dangereuse sous tout rapport (l’un des meilleurs rôles de Mélanie Griffith) pendant la scène de bal…


Blow up

Blow up au-delà du chef d’œuvre d‘Antonioni, c’est aussi une scène d’anthologie : l’une des premières représentations réussies d’un groupe de rock en live, les Yardbirds, en l’occurrence, filmés au plus près dans un fameux club underground du Swinging London, le Ricky Tick. On y ressent l’intensité et la rage de Jimmy Page et Jeff Beck devant un public de jeunes branchés, les mods, figés et éberlués et en complet décalage…

Le film en lui-même annonce déjà les impasses et les contradictions de cette jeunesse londonienne révoltée mais déjà happée par le business.


C’est Spinal Tap

Le premier véritable film se moquant férocement de la vie des nouvelles idoles milliardaires du rock fut l’œuvre, au milieu des années 70 du Monty Python Eric Idles. Il créa The Rutles pour la télévision avant d’en faire en 1978 un faux documentaire All you need is cash. Et d’ailleurs puisqu’il s’y’ reconnu facilement, le Beatles Georges Harrison au sens de l’humour développé finança ensuite le film La Vie de Brian des Monty Python.

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Quelques années plus tard en 1984, Christopher Guest accompagné de Harry Shearer et Mickael McKean lance le groupe Spinal Tap groupe de Heavy Métal comme il en existe d’innombrables au Royaume-Uni à l’époque. Il apparait dans un premier temps à la télévision pour très vite propulser les aventures du groupe sur grand écran. This is Spinal Tap est une parodie du circuit rock heavy métal et progressifs des années 70 et en mème temps des rockumentaires boursouflés et hagiographiques qui commencent à se multiplier.

Le film raconte concrètement une tournée se transformant en désastre et enchaine scènes et dialogues d’anthologie désopilants entrés dans la mémoire collective au point qu’on les jureraient authentiques... En réalité le succès de film se fit par l’intermédiaire des vidéoclubs et des VHS passant de main en main.

Son titre est aussi devenu une expression populaire sarcastique (c’est Spinal Tap) utilisée régulièrement aujourd’hui pour décrire certaines situations qui pourraient se confondre avec la fiction.

L’héritier direct de Spinal Tap fut sana aucun doute Wayne’s World mais changement d’époque, avec pour héros, des fans affalés sur leurs canapés devant la télévision.


The Harder they come

Il y eu les films de Gordon Parks, Superfly et Shaft, la fameuse Blaxploitation et les titres intemporels de Curtis Mayfield et Isaac Hayes…

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Et il y eu The Harder they Come de Perry Henzell avec le chanteur Jimmy Cliff pour principal acteur, et un premier film tourné en Jamaïque dévolu au reggae.
Le film vaut pour sa bande originale avec des titres chantés par Jimmy Cliff (Many rivers to cross) mais aussi pour ses classiques comme Pressure Drop des Toots & the Maytals, entre autres…

Jimmy Cliff surfera ardemment sur ce film pour accéder à la notoriété et au succès dans la variété internationale avec la consécration et le tube Reggae night dans les années 80...


Nouvel Hollywood

À la fin des années 60 les premiers films sous influence de la contre-culture voient le jour. Et biberonnés au flower power et à Woodstock, des cinéastes en herbe ou improvisés se lâchent.

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Easy Rider symbolise ce nouvel esprit, le road-trip, les hippies, les drogues, et le rock... Combien de fois avons-nous entendu le Born to be wild de Steppenwolf mis à toutes les sauces pour illustrer la soif de liberté, la route…

En tout cas Dennis Hopper lance les dés et des réalisateurs qui ont baigné dans ces musiques vont mettre un point d’honneur à en truffer leurs films.

Sur la côte Est, bien avant Tarantino, Martin Scorsese juge indispensable de donner une place dans ses longs métrages aux musiques contemporaines de l’action, qui influencent même sa mise en scène. Mean Streets, avec l’utilisation de Be My Baby des Ronettes ou du Jumpin’ Jack Flash des Stones inaugure merveilleusement le long chemin de vie commune de Martin Scorsese avec le rock et la musique.

À Los Angeles autre enfant prodige, Francis Ford Coppola signe le coup parfait avec un Apocalypse Now impressionnant et vécu comme une claque à sa sortie. Qui entend La Chevauchée des Walkyries de Wagner pense immédiatement aux hélicoptères fonçant balancer du napalm sur les villages du Vietnam.
Coppola en fait un hit rock. Qui entend The End des Doors pense à Marlon Brando et Martin Sheen cauchemarder dans la jungle... L’alignement de tubes pop tout au long de ce trip sous acides en font l’une des plus incroyables bandes originales du 20ème siècle.


Cinéastes rock.

En 1987, Wim Wenders est déjà un cinéaste réputé de l’underground berlinois. Il y côtoie depuis longtemps la scène musicale foisonnante et radicale, (notamment Blixa Bargeld et son groupe Einsturzende Neubaten) qui attire sans cesse de musiciens de tous horizons. Bowie y a retrouvé la flamme artistique en compagnie d’Iggy Pop.

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Dans Les Ailes du Désir, Palme d’or à Cannes, Nick Cave et ses Bad Seeds avec Blixa Bargeld, sont omniprésents. Une séquence de concert va largement contribuer à faire connaitre Nick Cave au-delà des cercles d’initiés, à de nouvelles générations d’adolescents curieux que le From Here to Eternity chamboula. Pour Nick Cave ce n’est que le début d’une longue histoire avec le cinéma.

Hal Hartley est un peu le cousin d’Amérique de Wenders. Le New-Yorkais totalement immergé dans la scène musicale de sa ville ne se gêne pour intégrer la crème de l’indie rock dans ses films : Sonic Youth, PJ Harvey, Pavement, My Bloody Valentine …
Dans Simple Men, outre le Kool Thing de Sonic Youth, il signe sous le pseudo de Ned Rifle une splendide bande son en compagnie de ses amis et néanmoins prodigieux Yo La Tengo.

Une B.O tarantinesque. L’expression courante dit tout. Quentin Tarantino s’approprie presque l’idée de la B.O. à part entière. De Reservoir Dogs le premier, à Il était une fois Hollywood, ses films regorgent de pépites à découvrir, redécouvrir. Un régal absolu jusqu’à l’indigestion parfois…

Pour son onzième long métrage, Only Lovers Left Alive, Jarmush nous plonge au cœur du quotidien d’un couple de vampires dont l’un est musicien et ce durant plusieurs siècles. Entre le Dracula de Coppola et les errances urbaines à la Jarmush, il est impossible de dissocier cette romance gothique de la musique de Josef Van Wissen, pesante, sombre, mélancolique et poétique à souhait.
Si SQÜRL groupe expérimental dont Jarmush est le guitariste et compositeur, est aussi très présent, le luth de Josef Van Wissen sonne terriblement juste. Il obtient sans discussion possible le prix de la meilleure musique originale au Festival de Cannes en 2013.

D’ailleurs quand Josef Van Wissen donnera un concert ici à Lorient au sein de la petite Chapelle St Christophe un soir d’hiver, tout dans son attitude avant et pendant le concert donnera l’impression d’un personnage directement échappé du film…

Menace II Society est la première œuvre cinématographique des frères Hugues en 1993.
Ils y affirment pour la première fois une ambition politique et sociale qui dénonce les violences du ghetto, le racisme, la pauvreté, les ravages des drogues et de son trafic.

Certes, il y eu deux ans avant le Boyz N the Hood de John Singleton. Et encore auparavant la comédie Do The Right Thing de Spike Lee dans lequel sonne avec fracas les premières incursions du hip-hop avec la bombe Fight the Power de Public Enemy.
Mais les frères Hugues, avec une bande son irréprochable font de Menace II Society une référence à la fois revendicatrice et convaincante pour le grand public.

L’industrie s’empare ensuite du phénomène. Le hip-hop va prendre le pouvoir dans l’industrie du disque et infiltrer la plupart des bandes sons du cinéma.

Deux belles réussites 8 miles de Curtis Hanson pour Eminem en 2008 et Straight Outta Compton pour N.W.A en 2015 vont accompagner ce mouvement inéluctable.


Fight Club

Black Francis ex-leader des Pixies, est au creux de la vague après la séparation douloureuse du quatuor en 1994, notamment en raison de sa mésentente avec Kim Deal qu’il jalouse, elle qui a trusté les charts mondiaux avec les Breeders et Cannonball.

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Car les Pixies, groupe de rock indé américain, ont certes collectionné les dithyrambes, rempli les salles et vendu des albums mais en définitive ils n’ont fait qu’effleurer la gloire.

Frank Black balance alors des albums à la pelle plus ou moins bâclés. Les rêves de gloire ont l’air d’être derrière lui… Il traine son spleen sur les scènes d’Europe mais en ce début de 21ème siècle, lors de ses concerts sur les festivals d’été, en plein air il joue Where is My mind, (morceau de Surfer Rosa,premier album du groupe sorti en 1988) et il voit le public le reprendre en cœur dans une sorte de communion extatique. Et lui de se laisser submerger par l’émotion…

Lors de l’un de ses concerts en France en 2001, il avouera dans les loges son étonnement. Et on lui montrera après le concert les images filmées pour Arte, les gamins chanter.

Tous avaient dû ressentir les mêmes émotions devant le Fight Club de David Fincher, film culte, source de polémiques et échec commercial, pour cette scène d’anthologie dont Where is my mind en a fait le sel… Et que d’ailleurs la plupart découvrirons plutôt en DVD.
Le retour de flamme se confirme, Black Francis reforme alors les Pixies sans Kim Deal en 2001 pour des tournées triomphales qui se prolongent encore aujourd’hui.

Une version au piano aura les honneurs de la remarquable série fantastique multi récompensée The Leftlovers à partir de 2014.


Garden State

À l’origine petit film indépendant type Sundance ce Garden State va connaitre un succès surprenant par la présence solaire et épatante de Natalie Portman. Il va aussi permettre à The Shins groupe de pop indé d’Albuquerque au Nouveau Mexique à la renommée toute relative, inspiré par les Smiths et destiné au public des fans américains de Belle & Sebastian, de se construire une improbable carrière internationale.

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« Écoute ce titre, il va changer ta vie », New Slang va devenir un hymne par la magie d’une scène où Natalie Portman encore jeune star en devenir, fait écouter dans son walkman cette chanson à son voisin et fait fondre la totalité des cinéphiles ayant assisté à la projection du film.

The Shins et James Mercer son leader changent de statut, 3 ans après la sortie de l’ album et se retrouvent alors un peu désarçonnés à remplir des salles et à devoir le promouvoir alors qu’ils viennent de sortir le deuxième, Chute to Narrow. Ils rencontrent le succès jusqu’en Europe et attirent la foule même en France, l’Elysée Montmartre en lieu et place de la Boule Noire et ses hipsters indie rock.
Presque 20 ans après la sortie de ce film, cette scène, ce morceau n’ont rien perdu de leur fraicheur.

Il existe des dizaines d’autres cas bien sûr. De Mr Robinson et The Sound of Silence qui ont bien aidé Simon & Garfunkel a connaitre un succès planétaire, au One hit Wonder d’Urge Overkill, avec une reprise de Neil Diamond Girl, You’ll Be a Woman Soon, pour Uma Thurman et John Travolta dans Pulp Fiction.
Ou bien le Street of Philadlephia de Bruce Sprinsteen pour Philadelphia (Jonathan Demne), énorme succès critique et commercial contribuant à relancer la carrière du boss et lui donner une image plus moderne.


Teenage kicks.

Don’t You Forget About Me, tube interplanétaire de Simple Minds : sans doute ne reste-t-il que cela dans les mémoires de ce Breakfast Club, production du milieu des années 80, pour la plupart de ceux ont dû la voir à la télévision plus qu’au cinéma. Le groupe écossais ne fut pas toujours très à l’aise avec ce titre. Il refusa même un temps de le jouer en concert. A l’origine le titre fut proposé à Bryan Ferry puis à Billy Idol qui ne donnèrent pas suite alors que Simple Minds déclina avant finalement de céder…

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Derrière cette histoire écrite et réalisée par John Hugues, le monsieur teen movie américain, celle d’une journée de colle pour 5 lycéens aux profils archétypaux, le film aborde subtilement les questions existentielles de l’adolescence de manière beaucoup moins superficielle qu’il n’y parait… Les dialogues sont remarquables.
En l’associant à Pretty In Pink, écrit par le même John Hugues et avec une merveilleuse B.O comprenant des classiques de Psychedelic Furs, New Order, Smiths ou Echo & The Bunnymen, cela ressemble tout simplement à une sorte de sainte trinité du genre.

Teenage apocalypse trilogy, voilà comment Gregg Araki décrit cette suite composée de Totally F***ed Up (1994), The Doom Generation (1995) et donc Nowhere. Le décor est bien planté et bien éloigné d’American Graffiti, Breakfast Club ou Pretty in Pink. Ce Nowhere est aussi le plus maitrisé des trois films.
C’est une sorte de Beverly Hills psychédélique, un voyage halluciné d’adolescents paumés entre comportements destructeurs, quête de sens et ambiance de fin du monde. Les accointances avec Bret Eston Ellis et ses romans Moins que Zéro et Les lois de l’attraction sont nettes. La musique élément central de la vie de ces ados souligne parfaitement son époque et en fait le premier film « shoegaze ».
Slowdive en ouverture donne le ton. La série Euphorie pourrait faire office d’héritière directe des années 2020.…

Certaines fois l’adéquation entre un film et certains titres de sa bande originale ayant pourtant connu leur propre vie, se marient tellement comme une évidence, qu’ils y restent à jamais liés. Donnie Darko, premier film de Richard Kelly (qui réalisera plus tard le déjanté et culte Southand Tales) appartient à cette catégorie.
Les scènes au son de The Killing Moon de Echo & The Bunnymen, ou de Under the Milkyway de The Church sont particulièrement abouties. Mais ce teenage movie à l’atmosphère sombre et fantastique, entre David Lynch et Philip K.Dick, très lointain cousin des films de John Hugues deux décennies plus tôt, raconte l’adolescence et ses tourments face à un monde passif, mais aussi la schizophrénie, l’élasticité de l’espace-temps entre autres.

Premier rôle remarqué de Jake Gyllenhaal, futur Superman, il est perçu comme hermétique à sa sortie pour finir par rencontrer un public, notamment en Europe, après 2 ans de bouche et oreille. Sûrement aussi grâce à cette scène bouleversante de la fin du film au son d’une reprise sublime de Tears For Fears, Mad World, chantée par Gary Jules et arrangée par Michael Andrews auteur de la totalité de la bande son.

Récemment à l’occasion d’un live a la télévision britannique pour leur retour discographique Tears For Fears jouait ce titre. Le présentateur remercia ensuite en direct, le groupe pour cette belle reprise, ne sachant pas, qu’ils en étaient les véritables auteurs. Confusion pardonnable, car récurrente, pour une grande partie du public aujourd’hui.


Biopics

S’il y a bien une catégorie dont l’industrie du cinéma raffole c’est la biographie de star, en général morte et enterrée. La tendance s’est accentuée depuis 2000 en pleine vague rétromania, mais depuis 40 ans de très nombreux biopics de stars du rock ont vu le jour, le plus souvent pour un résultat décevant, convenu ou insipide car sous la coupe des maisons de disques, des producteurs ou des ayant droits.

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Certes, des réussites il en existe quelques-unes : The Rose (fortement inspirée par la vie de Janis Joplin), Walk The Line sur Johnny Cash, Bird et Honky Tonk Man de Clint Eastwood, Control de Anton Corbjin ou le très sous-estimé Love & Mercy de Bill Pohlad, mais ils font plutôt office d’exception.

On pourrait y ranger 24 hours Party People, une comédie sortie en 2002, réalisé par Michaël Winterbotton en compagnie de Frank Cottrell Boyce à l’écriture, passée sous les radars en dehors de l’Angleterre mais présentée au festival de Cannes.
Cette petite production sans réelle prétention initiale est consacrée à la vie et l’œuvre de Tony Wilson personnage central fantasque, charismatique, entrepreneur et présentateur de Granada TV, à Manchester dans les années 70 et 80. Il présenta ainsi une émission où se produisirent tous les groupes punk et post-punk de l’époque parfois pour leur première fois.

Le titre du film à lui seul résume totalement la vie autour du label Factory, de la Hacienda et la naissance de cette fameuse scène de Manchester qui va essaimer à travers le monde. 24 Hours Party People contextualise d’une manière nouvelle, décalée à l’humour tout mancunien, et finalement plus réaliste, le mythe, de la triste Angleterre du nord sinistrée des années Thatcher jusqu’à l’explosion madchester.

De l’aveux même des témoins et protagonistes de l’époque, le film reproduit assez fidèlement toute cette histoire, ses tragédies, ses absurdités cette impression de frénésie incontrôlable qui mènera tout ce petit monde plus ou moins à la ruine.

The Runaways le film est signé par la vidéaste talentueuse Floria Sigismondi. Elle dirige un casting de haut vol (Kristen Stewart, Dakota Fanning et Michael Shannon) à partir de l’autobiographie de Cherie Curry, Neon Angel.

Tout le monde connait I love Rock n Roll de Joan Jett & the Blackhearts (une reprise de The Arrows), personne (ou presque) en Europe ne connait The Runaways… Aux Etats unis et même en Asie le groupe a connu cependant son heure de gloire.

À l’origine, The Runaways est monté par le redoutable producteur Kim Fowley qui voit le potentiel commercial de ce qui n’est qu’un girl’s group épousant les fantasmes des rockeurs sur les groupies omniprésentes autour des groupes. Mais Cherry Curry et Joan Jett, s’inspirant de l’anglaise Suzi Quatro vont pervertir le groupe de l’intérieur et finalement en faire un combat féministe et une ode à la libération sexuelle qui ne se l’avoue pas.

De nombreuses américaines vont se reconnaître dans ce parcours chaotique et il est probable que Les Bangles, les L7, la scène des riott grrrls auront en mémoire ce Cherry Bomb plein de vie et d’espérance pour se lancer à leur tour.

I’m Not There (titre d’une chanson de Dylan) transcende l’idée même de biopic.

Superbe trouvaille de Todd Haynes déjà auteur du très sous-estimé Velvet Goldmine, le rôle de Bob Dylan est joué successivement par 6 acteurs et actrices. Au travers de ces incarnations sont interprétées différentes périodes de la vie pleine de mystères d’un songwriter omniprésent durant plus 50 ans en construisant qui plus est une œuvre esthétiquement parfaite. Cate Blanchett métamorphosée est fabuleuse et le film est d’une justesse magistrale et d’une énergie folle.


Dig !

Présenté à Sundance en 2004, où il fut d’ailleurs primé, Dig ! est un documentaire retrace les destins croisés de deux groupes de la scène rock psychédélique de Los Angeles durant 7 années. Ce qui en fait sans aucun doute l’un des témoignages les plus saisissants de la vie tumultueuse d’une vie de groupe : The Dandy Warhols et The Brian Jonestown Massacre.

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Des excès en tout genre, des tournées interminables, des moments d’ennui, des concerts ratés, des angoisses artistiques, des questions existentielles, des déboires en tout genre, tout de ce que l’on imagine de la vie de la rock star underground à la recherche des sentiers de la gloire.

Le film raconte surtout la rivalité des deux leaders, frères ennemis, Anton Newcombe et Courtney Taylor. Ce dernier avec les Dandy Warhols, n’hésite pas une seconde à faire des concessions pour percer. Alors qu’avec son BJM, Anton Newcombe passe pour l’artiste intègre et radical qui attire les faveurs du spectateur.

D’autant plus qu’au succès critique s’ajoute le succès public avec pour conséquence inéluctable de brouiller les deux rivaux, alors qu’Anton Newcombe reprochera publiquement au réalisateur d’insister sur son côté destructeur.

On peut s’interroger cependant sur certains aspects du doc un poil manichéens, et même très scénarisé. Car Il n’y a pas si longtemps des langues se sont déliées, des versions différentes de la genèse du film se sont opposées.Le vrai du faux ? On n’en saura pas plus mais presque 20 ans après les Dandy Warhols ont quasiment disparu de la circulation, en subissant quelque peu les sarcasmes alors que BJM surfe sur le succès et possède une aura immense dans le milieu rock alternatif international…

Sugar Man, sur la vie du musicien oublié Sixto Rodriguez, film documentaire oscarisé et dont le succès eu une tout autre ampleur est lui aussi sujet à caution car comportant une bonne part de fiction.

Anvil the story of Anvil suit un peu les traces de Dig pour l’esthétique heavy metal avec de faux airs de Spinal Tap pour de vrai.


Nick Cave

Du rapport de Nick Cave au cinéma on pourrait presque écrire un livre, tellement il croise sa route depuis ses débuts à la fin des années 70. Il a multiplié les apparitions, les bandes sons. Et peut-être que la seule comparaison possible serait David Bowie.

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À partir de cette incroyable séquence de concert dans Les Ailes du Désir, il devient un compagnon de route de Wenders. Il va aussi multiplier les collaborations en tant qu’acteur, du rôle principal dans The Ghost of The Civil Dead à celui de troubadour dans L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford avec Brad Pitt, il irradie l’écran.

Concernant sa musique, seul ou en compagnie de son binôme, le magicien Warren Ellis, il laisse une empreinte presque sans équivalent ces 20 dernière années du moins dans l’univers du cinéma et de la série : de son Red right hand ouvrant chaque épisode de Peaky Blinders à la B.O de Shrek2 ou une belle scène dans Harry Potter

Avec Ellis il produit une multitude de scores dont les sommets incontestables The proposition en 2005 ou l’impressionnante pièce pour The Road de John Hillcoat avec Viggo Mortensen. Il écrit même une fantastique chanson qui accompagne un vol de canards dans un documentaire animalier de Jacques Perrin...

20000 jours sur terre n’est pas le premier documentaire sur Nick Cave, ni le dernier. Skeleton Tree enregistré après le décès de son fils est totalement bouleversant. Mais cette docufiction est scotchante de bout en bout.

Dans ce film très atypique, Nick Cave joue le rôle d’un Nick Cave très proche mais la très légère part de jeu lui donne tout son relief. On assiste au quotidien du rocker : on le voit au réveil, au petit déjeuner, chez le psy et surtout au piano en studio en plein work in progress avec des parties musicales fabuleuses…


Désordres

En 2007, est sorti un remarquable biopic, de Anton Corbijn sur la vie du chanteur de Joy Division, Ian Curtis à partir du livre de Deborah Curtis son épouse et de sa propre expérience puisqu’il côtoya le groupe en tant que photographe. à cette époque la notoriété de Joy Division s’est déjà largement échappée de l’obscurité.

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21 ans plus tôt, en 1986, Olivier Assayas se présente avec son premier long métrage : Désordre. Au travers des vies, des émois et des vicissitudes, des drames de jeunes adultes romantiques montant un groupe de rock.
Leurs espoirs finissent broyés par les effets de la mainmise croissante de l’industrie du disque sur le rock au milieu des années 80. Wadeck Stanczak l’un de protagonistes principaux avec notamment Lucas Belvaux, apparait dans un rôle ouvertement inspiré de Ian Curtis. Traduction du titre du film : Disorder, une chanson de Joy Divison.

Olivier Assayas ne cessera de truffer ses films de morceaux et de références à ses gouts musicaux jusqu’à cette année ou dans la série Irma Vep qu’il réalise pour HBO, on voit soudainement Thurston Moore (ex-leader de Sonic Youth), l’un de ses artistes fétiches, surgir furtivement d’un placard avec son groupe et lancer quelques riffs de guitare. Un caméo complètement hors sol et que seuls les yeux avisés vont repérer…


Les experts

Le métier de superviseur musical n’est certes pas nouveau mais l’ère des experts venus du monde de la pop prend de l’ampleur au cours des années 2000.

On passe ainsi d’une pratique qui consistait pour les maisons de disques à placer le maximum de titres bankables, à un travail artistique minutieux.
Comme curateurs ils vont nouer des relations étroites voir fusionnelles avec les cinéastes pour deviner les désirs de ces derniers. Mais revers de la médaille, la pratique va devenir peu à peu un enjeu, une stratégie marketing, qui finit par en banaliser son usage et en faire un gimmick pop trop évident.

Ces superviseurs proposent les titres de leur discothèques pharaoniques mais se lancent dans la composition. Ainsi Cliff Martinez, le batteur des Red Hot Chili Peppers a probablement plus fait pour le cinéma que pour la musique. En scrutant les génériques son nom apparait quasiment dans un film américain sur deux…

Parmi les maitres incontestés : Trent Reznor, le leader de Nine Inch Nails a supervisé deux des B.O les plus emblématiques de la fin des années 90 : Lost Highway de David Lynch et S7ven de David Fincher.

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De David Lynch on connait son rapport à la musique, sa collaboration avec Angelo Badalamenti. En choisissant Reznor pour Lost Highway qui place outre ses atmosphères musicales, des inédits de Rammstein, le I‘m Deranged de Bowie, Barry Adamson et autres, Lynch trouve l’acolyte idéal pour surligner ce maelström sombre et fantastique ahurissant.

Avec S7ven au-delà de sa B.O dantesque, Trent Reznor démarre une collaboration de longue durée avec David Fincher. Et reconnaissance internationale viendra en 2010 avec la B.O électronique de The Social Network en compagnie de Atticus Ross.

Peu de femmes arrivent à percer pour le moment. Seule la talentueuse islandaise Hildur Guonadottire (pour The Joker) et Mica Levi (Micachu & the Shapes) à la direction artistique de Under the Skin pour sa première B.O se sont fait une place dans le gotha.


Last but not least

Trainspotting film générationnel par excellence, conte les aventures de rent boy (rôle qui révèle Ewan McGregor) et de ses acolytes Sick boy et Spud toxicomanes notoires. Renton cherche à tout prix à s’extirper de son quotidien, recherche ses doses de dope au milieu des banlieues sinistrées d’Edimbourg.
Le film a choqué à sa sortie et notamment lors de sa présentation à Cannes pour la dureté de certaines réalités exposées parfois très crûment.

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Mais le succès du film, tiré d’un roman de Irvin Welsh, a incontestablement bénéficié d’une bande son prodigieuse.
Au-delà des tubes empilés c’est peut-être là que se produit la rencontre du grand public avec la musique électro jusque-là, hors du Royaume Uni, cantonnée à l’underground. Born Slippy titre du duo électro Underworld, réputé mais au succès modeste deviendra l’hymne d’une génération et de toutes les soirées pendant plus d’une décennie.

Cliff Martinez à la production, des nappes synthétiques collant parfaitement au souhait du réalisateur et deux singles typiquement synthwave planante, le Real Hero de College / Electric Youth mais surtout le Nightcall de Kavinsky  : voilà la recette pour une œuvre musicale parmi les plus belles et envoutantes des années 2010.
Issu du premier album de Kavinsky, avec un Daft Punk, Guy-Manuel de Homem-Christo à la production bien aidé par Sebastien Tellier, Sebastian et Lovefoxxx au chant, un genre de dream team, la French Touch connait la consécration cinématographique avec Drive.
Plus que l’intrigue, somme toute ennuyeuse c’est cette errance urbaine à l’esthétique Hopper et à l’atmosphère de fureur de vivre sous anxiolytiques surlignées par la B.O. et Nightcall, cette "driving in a city in the middle of the night song", qui prend les tripes…

Dans chacun de ses films Dolan utilise la musique sans complexe, avec une spontanéité renforçant sa capacite inégalable à proposer des scènes débordantes d’émotions souvent plus que poignantes et avec cette impression systématique que les chansons sont faites précisément pour ces scènes. Dans Mommy par exemple cette séquence de Steve sur son skate avec Wonderwall d’Oasis, tube par ailleurs trop entendu sur les ondes, dans ses oreilles est jubilatoire.

Mais dans Les Amours imaginaires (Heartbreaks) on atteint les sommets de l’univers Dolan, surtout avec ces deux chansons : Pass this on de The Knife et Keep the streets empty de Fever Ray.
Elles magnifient et subliment comme rarement l’écriture du metteur en scène, observateur hors pair des émotions et de leur exaltation.

Infos


Hydrophone prend la tangente.

On plonge dans une thématique en lien avec l’actualité (ou non), avec comme terrain de jeu, les musiques actuelles, évidemment.

Et puis on écrit, on compile, on fait des playlists, on (re)découvre des livres, des films, des albums.

Ce huitième épisode fait palpiter nos cœurs de modestes cinéphiles et de petits mélomanes avertis ou non, au son du rock à papa ou des dernières pépites trap ou électro.

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La sélection de 45 affiches de films exposées dans les couloirs des Studios

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(Re)Voir

• BlackBoard Jungle - Richard Brooks – 1955
• The girl can’ t help it - Frank Tashlin -1956
• Jailhouse rock - Richard Thorpe – 1957

• A Hard Day’s Night - Richard Lester – 1964
• Rude Boy - Jack Hazan David Mingay - 1980
• Purple Rain - Albert Magnoli - 1984
• The Beatles : Get Back - Peter Jackson - 2021
• More – Barber Schroeder - 1969
• There Will Be Blood - P.T. Anderson – 2007
• Belgica - Felix Van Goreningen – 2016
• Ghost Dog – Jim Jarmush - 1999
• Giallo - Dario Argento - 2011
• Virgin Suicides – Sofia Coppola - 1990
• The Blank Generation — Ivan Kral - Amos Poe – 1976
• Downtown81 - Edo Bertoglio - 1981 / 2000
• The Decline of Western Civilization - Penelope Spheeris – 1981
• Wild Style - Charlei Ahearn – 1983
• Almost Famous - Cameron Crowe – 2000
• Pump_Up_The_Volume - Alan Moyle – 1990
• High Fidelity - Stephen Frears – 2000
• Good Morning England – Richard Curtis - 2009
• Rock Academy - Richard Linklater - 2004
• Et pour quelques dollars de plus – Sergio Leone – 1965
• Blow up - Michelangelo Antonioni – 1966
• This is Spinal Tap – Rob Reiner 1984
• The Rutles : All You Need Is Cash - Eric Idles. - 1978
• Wayne’s World - Penelope Spheeris - 1992
• The Harder they come – Perry Henzell – 1971
• Shaft, Les nuits rouges de Harlem - Gordon Parks - 1971
• Mean Streets - Martin Scorsese – 1973
• Easy Rider- Dennis Hopper - 1969
• Apocalypse Now - FF Copola – 1979
• Les-ailes-du-désir - Wim Wenders -1987
• Simple Men - Hal Hartley – 1992
• Reservoir_Dogs - Quentin Tarantino – 1992
• Only Lovers Left Alive - im Jarmush – 2013
• Menace_II_Society - Hughe brothers – 1993
• 8 miles - Curtis Hanson - 2008
• N.W.A : Straight Outta Compton – F.Gary Gray - 2015
• Fight Club - David Fincher - 1999
• Garden state – Zach Braff – 2005
• The Breakfast Club - John Hugues – 1985
• Nowhere - Greg Araki - 1997
• Totally F***ed Up - Greg Araki - 1994
• The Doom Generation ¬- Greg Araki – 1995
• American Graffiti – Georges Lucas - 1973
• Pretty in Pink - Howard Deutch - 1986
• Donnie Darko – Richard Kelly – 2001
• 24 hours party People – Michael Winterbottom - 2002
• I’m Not There - Todd Haynes - 2007
• The runaways - Floria Sigismondi – 2010
• Dig - Ondi Timoner - 2004
• 20000 days on earth - ain Forsyth, Jane Pollard, Nick Cave - 2014
• L’assassinat de Jesse James par le lâche Rober Ford - Andrew Dominik -
• Désordre – Olivier Assayas - 1986
• Control - Anton Corbijn - 2007
• S7ven - David Fincher – 1995
• Lost Highway - David Lynch – 1997
• Trainspotting – Danny Boyle -1996
• Drive - Nicolas Winding Refn - 2011
• Heartbeats - Xavier Dolan – 2010
• Mommy – Xavier Dolan - 2014

Voir aussi…


Tangente#7 : Protest songs.

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Tangente#6 : Alors on danse !

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